Implanter sa société au Delaware, une vraie bonne idée ?

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Dans le milieu des entreprises, certains pays ou États possèdent une réputation plus ou moins sulfureuse. C’est le cas du Panama, des îles Caïmans et du Delaware. Qu’est-ce qui explique la réticence des dirigeants à y implanter leurs sociétés ? Cet article apporte des éléments de réponse.

Le Delaware, eldorado fiscal ou piège pour entrepreneurs ?

Le Delaware figure en tête de liste des états américains prisés pour l’investissement. Pourtant, pour bien des sociétés, y fonder son siège relève d’une stratégie risquée, surtout lorsqu’il s’agit d’obtenir des soutiens financiers internationaux. Sa législation souple attire autant qu’elle inquiète, car elle autorise la création d’entreprise sans exiger d’investissement de départ ni de présence physique sur place. Aucun siège social à installer, aucune obligation de réellement exercer une activité dans l’État : la porte est grande ouverte.

Un autre point qui frappe, c’est la confidentialité à outrance. Ici, une seule et même personne peut cumuler les rôles d’actionnaire, d’administrateur et de dirigeant, sans jamais voir son identité rendue publique. Le processus pour ouvrir un compte au Delaware et déposer les quelques documents requis s’apparente presque à une formalité.

Ce laxisme apparent a un revers : il permet, sur le papier, de contourner certains contrôles internationaux et de faire transiter des fonds via des sociétés écran. Des pratiques qui collent au Delaware une image de zone grise, peu compatible avec la transparence attendue dans les affaires mondiales.

Explorer d’autres États américains pour créer sa société

Face à ce constat, d’autres options émergent pour les entrepreneurs en quête d’un environnement attractif sans tomber dans les travers du Delaware. Le Nevada, par exemple, tire son épingle du jeu avec un climat propice aux affaires, notamment dans le secteur du divertissement. Les sociétés y bénéficient d’une solide protection juridique, n’y paient pas d’impôt étatique et les dirigeants restent discrets.

Le Wyoming s’impose également comme une alternative crédible. Premier État à avoir introduit la Limited Liability Company (LLC), il offre aux investisseurs une structure souple, à l’image de la SARL française. Là aussi, anonymat et absence d’impôt sur le revenu des sociétés sont au rendez-vous.

Impossible de ne pas évoquer le Texas, devenu un terrain de jeu privilégié pour les start-up, talonné de près par la Californie. Sur place, les taxes existent mais restent inférieures à ce que pratiquent d’autres États. Cet écosystème attire les jeunes entreprises en quête de croissance rapide et de fiscalité supportable.

Delaware société

Créer une société aux USA : l’essentiel à savoir

Lancer son activité outre-Atlantique n’a rien d’une odyssée. Première étape : bâtir un business plan solide, puis rédiger les statuts. Sur ce point, mieux vaut s’entourer d’un professionnel, tant la législation américaine réserve son lot de subtilités.

Vient ensuite l’enregistrement officiel. Il s’agit alors de choisir une forme juridique adaptée (corporation, partnership, sole proprietorship ou LLC) et de sélectionner l’État d’incorporation.

Après ce choix, plusieurs démarches restent à accomplir : dépôt des statuts, sélection du régime fiscal, obtention d’un numéro EIN, déclaration CFIUS pour les investisseurs étrangers, et validation administrative de toute antenne hors de l’État choisi. Une fois ces étapes franchies, l’ouverture d’un compte bancaire professionnel s’impose. Voici les documents qui sont généralement exigés :

  • les justificatifs d’enregistrement de la société,
  • le numéro EIN attribué,
  • un justificatif d’adresse de l’entreprise,
  • un justificatif d’identité du ou des dirigeants,
  • et parfois, une brochure présentant l’entreprise.

Dernière étape, mais pas des moindres : souscrire à une assurance pour couvrir locaux, employés et activités.

Il ne s’agit là que du cadre général. Avant toute démarche, chaque choix demande réflexion,depuis la forme sociale jusqu’aux premières décisions structurantes, qui s’avèrent souvent irréversibles. Se faire accompagner par un spécialiste ou un avocat, dès le départ, permet d’éviter les surprises et de sécuriser son projet.

L’Amérique attire, le rêve d’entreprise y reste puissant,mais le choix de l’État, du statut et des partenaires pèsera lourd sur la trajectoire. À chacun d’écrire son histoire, en gardant la lucidité d’un pionnier sur une terre pleine de promesses et d’ambiguïtés.